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Quel est le problème avec la biofortification ? La bataille pour de véritables solutions à la malnutrition a commencé

by GRAIN | 15 Jul 2019
Les légumes indigènes tels que les « quelites » au Mexique sont partie intégrante des diètes locales, ont de multiples propriétés thérapeutiques et atténuent la faim quand celle-ci s'installe. Pourtant, les intérêts réductionnistes qui encouragent la biofortification ignorent cette diversité. (Photo : Larousse de la cuisine Mexicaine)

La "biofortification" vise à augmenter une petite sélection des nutriments de certaines plantes grâce à la sélection végétale, soit en utilisant des techniques conventionnelles, soit en recourant aux nouveaux outils de la biotechnologie. Alors que nous devons obtenir 40 nutriments par notre alimentation pour être en bonne santé, la recherche sur les cultures biofortifiées ne se concentre que sur trois d'entre eux: le zinc, le fer et la vitamine A.

La recherche est actuellement en cours pour développer des variétés biofortifiées de riz, blé, sorgho, banane, lentille, pomme de terre, patate douce, manioc, haricot et maïs, en Afrique, en Asie et en Amérique Latine. Une partie de cette recherche est gérée par le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR) répartie sur trois unités ; l’Institut international de recherche sur le riz, qui se concentre sur le riz génétiquement modifié (GM) ; le Centre international de la pomme de terre, axé sur les patates douces ; et le programme HarvestPlus, qui coordonne tout le reste. Les financements viennent de la Fondation Bill et Melinda Gates et de l'USAID, entre autres. La recherche privée est aussi financée par PepsiCo, Dupont, Bayer, Nestlé et autres.

Les partisans de la biofortification soutiennent que c'est la réponse la moins chère à la malnutrition. Une fois que la plante a été sélectionnée, elle peut être cultivée encore et encore. Ils utilisent souvent un langage trompeur pour faire la promotion de ces cultures, à commencer par le mot « biofortifié » lui-même, qui suggère que toutes les autres variétés ou aliments sont fondamentalement faibles ou déficients.

Quelques projets de recherche clés sur les cultures biofortifiées en Inde, Bangladesh, Philippines, Indonésie, Kenya, Ouganda, Zambie, Nigeria, Niger, Brésil, Mexique et Espagne.
Des termes comme « riz doré », « super banane » et « maïs orange » sont utilisés pour convaincre les consommateurs que les versions biofortifiées de ces semences ou aliments sont supérieures à leurs équivalents non biofortifiés. Ces dénominations, sans parler des plantes elles-mêmes, font parfois l’objet de l’enregistrement d’un droit de propriété intellectuelle, même si elles sont destinées à être utilisées gratuitement.

À ce jour, environ 300 variétés de cultures biofortifiées ont été mises au point et diffusées dans le monde. Si aucune des plantes biofortifiées fournies aux agriculteurs n’a été modifiée génétiquement, un certain nombre sont en cours de développement et prêtes à être introduites.

Les femmes et les enfants sont souvent ciblés comme principaux bénéficiaires des cultures biofortifiées. Mais les communautés rurales et les groupes de femmes du monde entier considèrent souvent la diversification des systèmes alimentaires locaux et des régimes alimentaires traditionnels comme la véritable solution à la pauvreté et à la malnutrition.

GRAIN et amis lancent un appel à l'action ; invitant les groupes de femmes et les organisations paysannes à se pencher sur la question de la biofortification aux niveaux local, régional, national et mondial. Il existe suffisamment d’informations et d’expérience pour justifier un boycott de toutes les cultures et de tous les aliments biofortifiés, ainsi que des demandes d’investissement dans une approche différente de la recherche agronomique basée sur l’agroécologie, la culture locale et la souveraineté alimentaire.

Nous proposons que les approches alternatives de lutte contre la faim et la malnutrition soient basées sur les cinq principes suivants :

1. Partager les informations et sensibiliser aux modes de vie sains et une alimentation saine, l’accent étant mis sur les femmes et l’égalité des sexes ;
2. Renforcer le leadership des femmes dans la prise de décision en matière de politique alimentaire et la recherche sur les systèmes alimentaires ;
3. Promouvoir la diversité dans l’agriculture et les régimes alimentaires, et non les monocultures ou les régimes alimentaires monotones. Cela passe par la valorisation des plantes et des animaux locaux, des cultures vivrières, des semences et des connaissances locales qui assurent la santé et maintiennent la force des communautés ;
4. Réduire les coûts et augmenter la disponibilité des fruits et légumes en partie en réorientant les subventions et autres fonds publics favorisant actuellement les produits industriels et les aliments transformés ;
5. Résister à la prise de contrôle néolibérale de l’alimentation et de l’agriculture qui traitent l’alimentation et les cultures comme des marchandises et une propriété intellectuelle brevetable afin de favoriser les profits des entreprises. Pour s’attaquer aux causes profondes de la pauvreté et de la faim, il est nécessaire de maintenir le contrôle du public et des communautés sur l’alimentation et l’agriculture.

Pour en savoir davantage, voir le rapport complet "Cultures biofortifiées ou biodiversité ? La bataille pour de véritables solutions à la malnutrition a commencé" sur www.grain.org/fr/article/6244

Une initiative de : GRAIN, Pesticide Action Network Asia Pacific (PANAP), Food Sovereignty Alliance India, People's Coalition on Food Sovereignty (PCFS) African Food Sovereignty Alliance (AFSA), Eastern & Southern Africa Farmers' Forum (ESAFF) et Growth Partners Africa
Author: GRAIN
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