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Déclaration de l’ASPSP concernant l’adoption imminente du règlement visant l’introduction des OGM en Afrique de L’Ouest

by Association Sénégalaise de Producteurs de Semences Paysannes (ASPSP) | 18 Sep 2014

Déclaration de l’ASPSP du 13/09/2014 concernant l’adoption imminente par les ministres de l’UEMOA/CEDEAO du règlement visant l’introduction des OGM en Afrique de L’Ouest.

Le 18/09/2014 les ministres de l’UEMOA se réuniront à OUAGADOUGOU, capitale du Burkina Fasso, pour décider d’adopter le règlement visant l’introduction des OGM en Afrique de l’Ouest appelé « Avant projet de règlement portant sur la prévention des risques biotechnologiques en Afrique de l’Ouest ».

Il s’agit d’une mesure extrêmement importante qui va affecter la vie de tous les paysans et les populations de l’Afrique de l’Ouest. A vrai dire, les populations ne sont pas informées de cette importante réunion.

Les organes de l’UEMOA/CEDEAO et CILSS ont travaillé pendant de longues années pour préparer l’introduction des OGM en Afrique de l’Ouest, sans que les populations, principales concernées, en soient impliquées.

Maintenant le processus entre dans sa phase finale, c'est-à-dire l’adoption du règlement autorisant l’introduction des OGM en Afrique de l’Ouest.

Il s’agit plus précisément de la libre circulation des OGM en Afrique de l’Ouest prévue par l’avant projet de règlement en question.

Fatoumata Dousou semant du riz à Kolda, Sénégal. (Photo : Global Giving) Pour les populations du monde rural, les OGM représentent une menace grave pour l’agriculture paysanne, pour l’environnement et pour la santé humaine et animale (tumeurs chez les animaux de laboratoire nourris avec les OGM), la libre circulation des OGM est encore plus grave.

Les OGM ne sont pas des produits ordinaires bien connus par les populations, on ne doit envisager la possibilité de la libre circulation des OGM, produits nouveaux aux effets imprévisibles.

Les OGM sont incompatibles avec l’agriculture paysanne basée sur les semences traditionnelles adaptées aux conditions locales, reproduites par les paysans, de génération en génération.

Les semences OGM sont très chères, elles doivent être renouvelées chaque année et nécessitent l’utilisation des engrais et pesticides chimiques qui provoquent la dégradation accélérée des sols, entre autres.

Toutes les semences OGM sont brevetées, ce qui signifie qu’elles présentent la propriété intellectuelle privée de MONSANTO ou d’une autre firme, par conséquent, les paysans qui achètent leurs semences sont totalement dépendants des firmes. Les semences OGM brevetées ont perturbé le fonctionnement de la justice qui, dans de nombreux pays, a condamné à de lourdes peines d’amandes les paysans dont les champs étaient contaminés par les OGM. Ce sont les paysans, victimes de la contamination par les OGM, qui sont criminalisés, voilà l’effet pervers des OGM !

L’idée de brevet est totalement incompatible avec la mentalité africaine pour qui la vie est sacrée et la semence est la quintessence de la vie. La mentalité africaine reconnait uniquement le droit collectif sur les semences, puisque l’existence d’une communauté dépend étroitement des semences qu’elle possède, qu’elle a hérité de ses ancêtres et qu’elle va transmettre à ses enfants. Les semences font partie intégrante d’une communauté africaine, elles interviennent dans sa vie productive, culturelle, économique et spirituelle ; une communauté qui perd ses semences court un grand danger.

Contrairement aux affirmations des firmes multinationales, promoteurs des OGM, de nombreux faits ont démontré que les OGM contaminent les autres cultures environnantes provoquant ainsi la perte de la biodiversité agricole. Comme conséquence ; il y aura la disparition des variétés traditionnelles qui constituent la base de l’autonomie semencière et de la souveraineté alimentaire.

Les variétés traditionnelles présentent l’alimentation de base des populations d’Afrique ; leurs qualités nutritionnelles et technologiques sont adaptées aux besoins alimentaires et aux méthodes de transformation locales. Pourquoi nous amener les OGM qui n’ont rien à voir avec nos besoins ?!

La découverte en 2001 de la contamination génétique du centre d’origine mexicain du maïs par les OGM a provoqué un véritable scandale, d’autant plus qu’à l’époque le Mexique observait un moratoire sur le maïs transgénique. Pour les populations autochtones du Mexique, le maïs représente non seulement la plante à la base du système alimentaire national, mais le fondement même de la vie. La grande majorité des Mexicains n'hésite pas à dire « nous sommes les enfants du maïs ». Lorsqu'ils ont découvert que leur maïs était contaminé par les OGM, ils ont vu ça comme une attaque de leurs croyances les plus sacrées et les plus fondamentales, une attaque contre l'identité mexicaine et une agression contre les cultures qui ont créé l'agriculture. 

Pour nous, les africains, les OGM présentent aussi une agression contre nos cultures. Actuellement il existe des programmes de recherches bien avancés sur la création du sorgo et du niébé OGM destinés pour l’introduction en l’Afrique de l’Ouest. Ces programmes présentent un danger de contamination par les OGM du matériel phytogénétiques du centre d’origine africain. Nous voulons cultiver nos variétés traditionnelles qui ont permit la survie de nos communautés pendant des millénaires, nous voulons préserver notre centre d’origine africain indemnes de toute contamination génétique !

Les variétés traditionnelles, présentent une qualité précieuse d’adaptabilité aux changements climatiques. Cette année nous observons un déficit pluviométrique important dans le Sahel pour la campagne hivernale en cours. Les récoltes à venir ne donneront pas les résultats escomptés, et les paysans seront les premiers à en souffrir. Déjà la période difficile de soudure a commencé.

Il ne faut pas profiter de cette situation pour imposer les semences OGM aux paysans africains en difficultés.

Nous l'Association Sénégalaise de producteurs de semences paysannes (ASPSP) adressons le message au gouvernement sénégalais demandant de défendre les intérêts des populations en général et notamment actuellement, au moment où les populations traversent une période difficile. *

Nous ASPSP adressons le message aux ministres de UEMOA/CEDEAO qui se réuniront le 18/09/2014 à OUAGADOUGOU de bien vouloir tenir compte de l’avis des populations, en général et paysans en particulier, pour ne pas se précipiter avec l’adoption du projet de règlement sur les OGM qui risquent de créer beaucoup de problèmes.

Nous ASPSP demandons à toutes les populations africaines, en général et les organisations paysannes en particulier, de se prononcer sur la question de l’introduction des OGM en Afrique de l’Ouest au moment où les ministres de l’UEMOA/CEDEAO vont prendre la décision sur le règlement concernant les OGM.

C’est l’avenir des générations africaines présentes et futures qui se joue actuellement.

 

* le droit des communautés locales à protéger leurs ressources phytogénétiques n’est pas encore adopté.

 

Author: Association Sénégalaise de Producteurs de Semences Paysannes (ASPSP)
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  • [1] http://www.aspsp-senegal.org/contact.html