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Déclaration de la COPAGEN-Burkina sur l'introduction et la généralisation de la culture du coton transgénique au Burkina (2)

by COPAGEN-Burkina | 15 Jul 2008

Par COPAGEN – Burkina (Suite et Fin)

(Première partie)

Au regard de tout ce qui précède la prudence requiert que nous nous abstenions de nous lancer dans cette aventure. Nous savons tous que les produits dérivés du coton sont utilisés dans l’alimentation humaine et animale au Burkina Faso. Or, de plus en plus d’études montrent que les risques liés à la consommation de produits transgéniques sont de plus en plus réels (problèmes d’allergie, perturbations immunitaires). Non seulement  la participation du public n’a pas été respectée au moment de la prise de décision d’introduire  des OGM sur le territoire burkinabé, mais  bien plus, l’on veut nous les faire produire et consommer sans requérir notre avis.

Femmes de Synergie Paysanne à Fada NGourma
(Burkina Faso), à côté de la Coordination Régionale.

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Les firmes qui encouragent ce jeu, gardons-le à l’esprit sont toutes des firmes qui avaient dans le temps produits les pesticides et les engrais de la révolution verte des années 70. Vu les résultats désastreux  de leurs produits sur l’environnement et voyant que pesticides et engrais chimiques sont de plus en plus contestés dans le monde, elles se reconverties dans la promotion de semences en transgressant les barrières entre les espèces.

Il est vrai que les promoteurs des OGM affirment que les produits agricoles transgéniques vont rapporter de larges bénéfices aux paysans et aider à réduire l’utilisation des pesticides. Mais, l’exemple de l’Inde est là pour affirmer le contraire ; en effet, les données collectées sur le coton Bt dans les champs des cotonculteurs par plusieurs services gouvernementaux et autres chercheurs indépendants montrent que le coton Bt a échoué. Des études menées également sur le coton Bt au Mexique, en Argentine et en Afrique du Sud ont été non concluantes. Aux Etats-Unis, ces études conduites récemment montrent que l’insecte ciblé par le maïs transgénique développe de la résistance.

Aujourd’hui, il est clair que les problèmes du coton dans la sous-région Ouest-Africaine n’ont rien à voir avec les semences, la productivité ou les rendements. Tout le monde sait que le coton africain est compétitif, mais que les problèmes qu’il rencontre résident dans les subventions que les Etats-Unis et l’Europe octroient à leurs propres producteurs de coton en violation des règles de l’OMC qu’ils ont eux-mêmes contribué à mettre en place, bloquant ainsi de façon injuste la compétitivité du coton africain sur le marché international. On s’étonne que dans ces conditions, certains pays de la sous-région, notamment le Burkina, investissent des ressources importantes et rares dans la production du coton Bt. 

Aussi, Monsieur le Premier Ministre,

  • Considérant que l’introduction des OGM dans notre pays pose la question centrale du contrôle politique de l’agriculture et de l’alimentation dans le contexte actuel de globalisation de l’économie ;
  • Considérant que les OGM posent de sérieux problèmes environnementaux liés à l’agriculture, des problèmes d’ordre économique, politique, culturel, éthique et sanitaire tant pour les hommes que pour les animaux ;
  • Considérant que l’imposition des OGM à l’agriculture africaine est contre les droits des communautés locales et contribue à une dépendance plus accrue des paysans et des paysannes vis-à-vis des multinationales semencières et de l’extérieur ;
  • Considérant que l’introduction des OGM dans notre pays entraîne des conséquences non seulement pour lui, mais aussi pour les autres pays environnants ;

Nous, membres de la COPAGEN/BURKINA et l’ensemble des organisations de la société civile du Burkina attachées à la préservation de notre patrimoine génétique

  • Exprimons nos plus vives protestations face à la manière dont le coton Bt est introduit au Burkina Faso au mépris des engagements internationaux auxquels notre pays a souscrit, démarrant des expérimentations en champ de coton Bt, sans information publique suivie de débats contradictoires et avant d’avoir mis en place un cadre juridique de biosécurité conséquent dans le pays ;
  • Rejetons la décision unilatérale prise par le gouvernement de se lancer dans une production au plan national du coton Bt, sur une superficie de 15.000 ha cette année.  

Epis de maïs exposés à la foire aux semences de
Fada Ngourma pendant la caravane du Burkina Faso

sEn conséquence de tout cela,

Appelons au vote d’un moratoire de cinq ans sur l’introduction de plantes transgéniques dans nos systèmes agraires, le temps nécessaire : i) d’informer les populations sur les enjeux réels des organismes génétiquement modifiés afin qu’elles puissent participer à tout débat sur la question et décider en connaissance de cause, ii) d’instaurer un débat national sur la problématique des OGM, iii) de renforcer les capacités nationales et de mettre en place toutes les structures administratives nécessaires préconisées en la matière, iv) de diligenter des études sur les impacts socioéconomiques, environnementaux, et au plan de la santé encourus par nos populations.

Ensemble, forts de la conviction qui nous anime, nous affirmons notre détermination à exiger la prise en compte des intérêts des populations productrices et des consommateurs que nos sommes, et à n’avoir de cesse d’agir tant que les multinationales propriétaires des OGM, tenteront de nous les imposer et de contrevenir à nos droits.

Ouagadougou le 19 Février 2008

La COPAGEN/BURKINA  

Author: COPAGEN-Burkina